Trixi Weis

Vernissage: jeudi 16 mai 2024 à 18h
en présence de l'artiste

invisibles, de Trixi Weis

Des vies minuscules au risque de ne jamais apparaître, gisant au sol, au plus bas, au plus près de la terre (humus), d’où provient étymologiquement l’humain (homo, signifiant « terrestre »). Figures universelles de pauvreté, c’est-à-dire de privation, impitoyablement exposées à la violence du Dehors. Figures d’humiliés, aussi, sous lesquelles souffre pareillement l’espèce, par absence d’empathie.

On peut à première vue ne pas les reconnaître, sous leur abri de peu, composé le plus souvent de déchets qui renvoient à notre propre déchéance. Sur les emballages de marchandises qui leur servent de toit, des noms bien connus de firmes, emblèmes éclatants du néolibéralisme où se reflètent les contradictions d’un monde dont on ne parvient plus à se défaire, avec les conséquences écologiques à long terme que l’on sait. C’est pourquoi leurs refuges sont comme des pièges dont ils sont captifs. Par ce détour subtil, Trixi Weis nous invite à regarder des êtres généralement laissés pour compte, à les placer au centre de notre attention.

Ce n’est pas le moindre mérite de cette exposition que de donner à voir un tabou social. Car pour voir, nous enseigne le travail généreux et sincère de Trixi Weis, il faut une rencontre. Il aura fallu s’approcher, puis s’abaisser pour découvrir ces existences mineures. C’est si rare, après tout, que l’on ait à s’incliner devant des pauvres.

Avec tendresse, l’artiste pétrit ses sculptures d’argile, chair d’humilité qu’elles partagent avec des créatures légendaires, d’Adam au Golem, comme un lointain écho à la formation pragoise de la plasticienne. De ses mains, elle soigne le monde comme il va mal. Et nous émeut par ses gestes de métamorphoses délicates.

Loïc Millot

Image:
Trixi Weis, détail de l’installation invisibles, 2024. Crédit photo: Frank Weber